Familles BRACLE (de) alias BRAECKELE (van) - HEMBYZE (van) - LA KETHULLE (de)

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Sommaire:



BRACLE (de) alias BRAECKELE (van)


BRACLE (de ou van), ancienne et illustre famille de la Flandre, qui possédait la seigneurie de Bracle ou Braeckele, près d'Alost, dont elle porte le nom, a produit divers personnages dont la mémoire mérite d'être conservée. — Rasse de Bracle, seigneur de Auterive, Moorslede, Duffele et autres lieux, épousa Agnès de Cuinghem. Douze enfants sont issus de ce mariage. L'aîné, Antoine, accompagna Charles-Quint au mémorable siège de Térouanne. Georges, le deuxième, qui, par la mort de son frère devint seigneur de Auterive ou Hauterive, s'est d'abord attaché au service du comte Ph. de Ligne, chevalier de la Toison d'or, et suivit sous sa bannière les diverses expéditions de Charles-Quint ; il devint ensuite, entre 1576 et 1579, bourgmestre de Bruges. Les dissensions civiles qui eurent lieu en cette ville rendirent son administration très difficile et il eut à lutter contre des obstacles de tout genre. On trouve encore son nom parmi les signataires de l'Union de Bruxelles en 1577. — Érasme, le troisième, ayant terminé ses études, partit un 1556, pour visiter la France, l'Italie et l'Allemagne; il fut ensuite échevin du pays de Waes. I1 est auteur d'un ouvrage intitulé : Recueil des seize quartiers et généalogies, avec leurs enseignements, dont sont issus les douze enfants procrées du mariage de Rasse de Bracle et de mademoiselle Agnès de Cuinghem. Ce recueil de format in-folio, qui peut être consulté avec fruit par ceux qui s'occupent de recherches généalogiques et historiques sur les familles nobles de la Flandre, est conservé en manuscrit aux archives communales de Gand. Indépendamment de ce qu'indique son titre, cet important travail comprend encore : 1° Les nobles de Flandre et maisons seigneuriales, avec leurs armes blasonnées; — 2° Les nobles de la Flandre mentionnés dans les annales de Meyerus, —3° Les nobles de Hollande, Gueldre, Namur, Liège, etc., dont parle le même annaliste; — 4° Les nobles de Flandre au temps du comte Louis de Male; —5° Les nobles, chevaliers, seigneurs et ceux sans titre, qui existaient en 1337 ; — 6° Généalogies des comtes de Flandre et ducs de Lorraine. Il contient en outre, la Relation du voyage en Orient de Jacques de Bracle. — Pierre, le quatrième fils, suivit la carrière militaire et servit en Italie. Quand il apprit que l'armée, dont il faisait partie, allait, sous la conduite du duc d'Albe, combattre ses compatriotes, il refusa énergiquement de suivre les drapeaux, ne voulant pas porter les armes contre ses concitoyens. Ce refus brisa sa carrière; il fut destitué. — Josse, le cinquième, fit ses études juridiques, devint docteur es lois, voyagea, et fut ensuite nommé conseiller du conseil de Flandre. — Enfin Jacques, le sixième fils de Rasse et d'Agnès de Cuinghem, fut adjoint en 1570 à Charles Rym, seigneur de Bellem, ambassadeur de Maximilien II, à Constantinople, probablement en qualité de secrétaire. Il rédigea la relation de son voyage, qui contient des détails intéressants sur les lieux, qu'il a visités, les mœurs et usages des habitants, les faits auxquels il a assisté, etc. On a vu à l'article de Nicolas Biesius, premier médecin de l'Empereur Maximilien II, que' ce savant praticien belge assista, d'après les ordres de l'empereur, à une opération de lithotomie faite sur Jacques de Brade, qui mourut des suites de cette opération. M. le baron de Saint-Génois parle de ce voyage dans la préface de son Mémoire sur Scepperus. Il l'attribuait à tort à Charles Rym ; mieux,renseigné depuis la découverte du manuscrit, il se proposait de reproduire cette Relation dans ses Voyageurs Belges, quand la mort est venue interrompre ses travaux. Aug. Vander Meersch.
le manuscrit cité. — Vander Aa, Biographisch Woordenboek. — De Jonge, De unie van Brussel, p. 194 et 195.
(source Dico Bio Belge)


HEMBYZE (van)

HEMBYZE (Jean van), célèbre agitateur et tribun flamand, né à Gand le 9 juillet 1513, mis a mort dans la même ville le 4 août 1584. I1 appartenait à l'aristocratie par la naissance, mais non par le caractère ni les idées ; son éducation avait été très soignée ; il connaissait bien l'antiquité, parlait avec une égale facilité la plupart des langues vivantes, et, grâce à de fréquents et lointains voyages, il possédait une rare connaissance des hommes et des choses. Tant d'avantages à la fois le destinaient à jouer un rôle marquant dans la révolte des Flamands contre le régime espagnol. Il ne se pressa cependant pas d'intervenir. On ne trouve son nom sur aucune des listes des signataires du Compromis des nobles de 1566. Son début politique paraît avoir été une protestation éclatante contre le prince d'Orange, l'archiduc Mathias et la Pacification de Gand. Il n'admettait pas qu'en temps de révolution l'on pût se montrer généreux ou confiant sans être dupe. En cela il n'avait pas tout à fait tort; où il pèche, c'est en refusant d'accepter une direction dans l'intérêt de la cause commune ; c'est en avouant franchement son intention de séparer les destinées de nos provinces flamandes de celles de nos provinces wallonnes dont l'attitude l'inquiétait, et qui, en effet, ne tardèrent pas à rentrer sous le joug de nos anciens maîtres par amour du repos. Quelques-uns de ses contemporains ont accusé Hembyze d'avoir voulu se faire comte de Flandre, mais c'est là sans doute une calomnie. Il était foncièrement républicain, et le titre de Premier de Gand, qu'on lui donna quand il fut bourgmestre de sa ville natale, semble avoir suffi à son ambition. S'il en avait été autrement, il est probable que sur les monnaies, qu'il fit frapper comme dictateur, on verrait son effigie en lieu et place des armories de la ville de Gand et des siennes. L'historien Brandt dit de lui qu'il était l'ennemi juré de toute servitude et de toute adulation. Mais ce n'est là que l'un des côtés de la grande figure d'Hembyze. Disons, pour compléter son portrait, qu'il combattait à outrance le sentimentalisme en politique et l'indifférentisme en religion, et que ceux qui prétendent le contraire le calomnient à plaisir ou par ignorance. Si l'on tient compte des temps et des lieux, on ne pourra se refuser de convenir que Hembyze était logique en mettant son intolérance sectaire au niveau de celle de ses adversaires politiques et religieux, et en disant, qu'à ce prix seulement, on pouvait combattre à armes égales et compter sérieusement sur l'avenir. Le prince d'Orange, au contraire, voulait triompher, à la longue, par la modération, et son insuccès à Anvers, en 1566 et en 1567, pouvait faire prévoir qu'il serait encore une fois débordé si, dans les provinces méridionales des Pays-Bas, où le catholicisme avait jeté les racines les plus profondes, il l'épargnait autant que le voulait la Pacification de Gand. Personne, d'ailleurs, ne respectait plus celle-ci, ni les Etats généraux, où les catholiques étaient en majorité, en publiant des décrets contre les protestants, ni ces derniers, en Hollande, où ils étaient en nombre grâce à l'émigration flamande et wallonne, en agissant de même contre les catholiques. Dans de pareilles circonstances, Hembyze et ses partisans réclamèrent hautement pour la ville de Gand le droit de repousser toutes les mesures générales qui seraient contraires à ses privilèges ou porteraient atteinte à son autonomie. Pieter Bor, dans ses Nederlandsche Beroerten (vol. ii, p. 85) a reproduit un curieux document, imprimé à Gand, dans les premiers jours d'août 1579, sans nom d'auteur, sous le titre de : Een korte openinghe der causen waerom het niet raedsam zy dat de prince van Orangien nu ter tyt comen soude binnen de stad van Gent. Ce qu'on y découvre sans peine, c'est qu'aux yeux des auteurs, — qu'on dit avoir été Hembyze et le pasteur Pierre Dathenus, — l'Union d'Utrecht a aboli la Pacification de Gand, que le roi d'Espagne n'est plus le souverain des Pays-Bas, que la Saint-Barthélémy a mis à jamais un fleuve de sang entre les Flamands et les Français, et que pactiser avec ceux-ci ou leurs princes, comme le fait Guillaume d'Orange, c'est trahir la patrie. L'illustre fondateur de la république batave résolut de faire bravement tête à l'orage et d'aller à Gand pour y confondre ses ennemis. Ni Hembyze ni Dathenus ne jugèrent à propos d'attendre sa venue. Sous le prétexte que le prince en voulait sinon à leur vie, du moins à leur liberté, ils prirent le large. Hembyze fut rattrapé et ramené à Gand. Quinze jours plus tard, il se rendit au Palatinat, ayant sur le cœur les reproches mérités que le prince d'Orange s'était contenté de lui adresser publiquement le 28 août 1579, la veille de son départ clandestin pour l'Allemagne, et il se remit à conspirer avec le prince Jean-Casimir et Dathenus. C'est ici que la mansuétude du Taciturne se montre dans tout son jour et va peut-être trop loin. Les ministres du duc d'Alençon lui reprochent, en effet, de n'avoir pas puni Hembyze selon ses démérites ; son propre frère, le comte Jean de Nassau, de ne point vouloir lui clore la bouche d'une façon ou de l'autre; mais le prince dédaigne la vengeance, considère un marché conclu avec ses ennemis comme étant aussi déshonorant pour lui que pour eux, et il espère sans doute les ramener à lui par le succès de sa politique. En ceci il se trompe, des hommes de la trempe de Hembyze et de Dathenus ne changent pas, ne se convertissent jamais. C'est la trahison du duc d'Alençon qui ramène les Gantois à Hembyze, l'ennemi acharné des Français. Ils s'étaient brouillé avec son beau-frère Ryhove, et celui-ci quitte la ville le 24 octobre 1588 au moment même où Hembyze, élu premier échevin avec des pouvoirs dictatoriaux, y fait sa rentrée, aux acclamations de ses partisans plus nombreux que jamais. Ce fut un court triomphe. Les affaires allaient mal, la trahison était partout. Dathenus défend son ami Hembyze jusqu'au jour où il acqiert la triste certitude qu'il préfère la paix avec l'Espagne à l'union avec la Hollande, c'est-à-dire à une réconciliation sans arrière-pensée avec le prince d'Orange. Son orgueil de tribun gantois le conseille mal, il se fait illusion sur sa popularité ; et en effet, au premier soupçon de trahison ,tout le monde se retourne contre lui. La partie s'était jouée entre lui et Ryhove, son beau-frère, resté fidèle au Taciturne et à l'idée de fédération, et il la perd. Une fois en prison, son orgueil tombe, sa dignité et sa présence d'esprit l'abandonnent. La plupart des quarante-deux chefs d'accusation mis en avant contre lui sont ineptes ; c'est à peine s'il se défend. Il était depuis quatre mois en prison quand la justice échevinale le condamna à mort. Il fut exécuté le 4 août 1584 sur la place Sainte-Pharaïlde. Sa tête qui avait été exposée au bout d'une pique, ayant roulé au pied de l'échafaud, le poète latin Maximilien de Vriendt, qu'il avait frappé en novembre 1583 d'un bannissement, eut le triste courage de faire sur cet accident une cruelle épigramme. Ce même poète avait été mieux inspiré quand il s'était moqué de la folie de Hembyze, qui, le 3 décembre 1583, à l'âge de soixante et dix ans, étant veuf et grand-père d'une nombreuse progéniture, avait épousé la jeune et jolie Anne Van Heurne. Le due de Parme se montra galant envers cette jeune et intéressante veuve. Aussitôt après la capitulation de Gand, qui eut lieu le 17 septern- i bre 1584, il lui fit remise des amendes auxquelles son mari avait été condamné. On ne saurait en disconvenir, cette gracieuseté du généralissime espagnol pèse plus lourdement sur la mémoire du tribun gantois que les quarante-deux chefs d'accusation mis en avant contre lui par ses concitoyens désillusionnés, et cependant nous ne pouvons nous défendre de croire qu'il a été jugé trop sévèrement. Les écrivains catholiques ou protestants ont été jusqu'ici très durs pour lui; les premiers parce qu'il a été sans pitié pour leur doctrine et pour ceux qui la professaient, les autres parce qu'il a poursuivi le prince d'Orange d'une haine véritablement farouche. Ce n'est point sa trahison, réelle ou non, qui fit tomber Gand au pouvoir des Espagnols ; la pauvre ville était affamée, ne pouvait plus être secourue, et sa capitulation n'était qu'une affaire de temps. Nous ne pouvons non pus nous résoudre à mettre sur le compte de Hembyze l'écrasement final du protestantisme en Belgique, parce que, ayant pillé les églises de Gand, détruit les monastères de la Flandre, emprisonné des évêques et chassé tous les catholiques, ces derniers s'étaient répandus dans les provinces wallonnes et avaient si bien excité les populations contre la paix de religion que la guerre s'était rallumée plus furieuse que jamais et avait donné la victoire au duc de Parme. C'est là de l'histoire fantaisiste. La réalité est assez triste par elle même. Hembyze avait à deux reprises trahi sa patrie en ne voulant trahir que le prince d'Orange qui, tout en se trompant parfois, en est demeuré le serviteur le plus dévoué, le chef le plus habile. C'est là, croyons-nous, la conclusion à laquelle on arrivera après avoir consulté avec plus de soin qu'on ne l'a fait jusqu'ici les correspondances officielles d'Alexandre Farnèse, du comte palatin lean Casimir et des deux personnages avec lesquels on prétend que Hembyze a échangé des lettres compromettantes, à savoir Servais Van Steeland, le bailli du pays de Waes, et Scepperus, seigneur d'Eecke, qu'il avait eu si longtemps à sa merci, comme prisonnier, dans le Prinsenhof de Gand.
Charles Rahlenbeek.
Kervyn de Volkaersbeke, Mémoires sur les troubles de Gand (1577-1579), par F. de Halewyn, Bruxelles, 1865, i vol., in-8".— Voisin, Jean van Hembyze, dans le Messager des sciences etdes arts, t. III. Gand, 4835. — P. Bernardus de Jonghe, Gendsche geschiedenissen, enz., van 1565 tot 1585. Gent, s. d. 2 vol. in-42. — W. Te Water, Historié der herv. kerk te Gent (1578-1584). Utrecht, 1756, 4 vol. 8°. —J. Vander Haeghen, La Bienvenue de Jehan de Hembyze à Gand. Bruxelles, 1861, in-8'.
(source dico bio belge)


LA KETHULLE (de)


KETHULLE (François de la ou van der), seigneur de Ryhove, né au château d'Everstein à Wondelgem lez-Gand, vers 1531, mort à Utrecht (P), le 15 juin 1585. Il était le second fils de Philippe de la Kethulle, seigneur de Haverie, Assche, Volckegem,Noorthout, Everstein, etc., qui fut plusieurs fois premier échevin de Gand (+ 1545), et de Françoise de Deurnagele (+ 1574). Lui-même signait d'ordinaire Franchois de la Kethulle les documents français et Franchois van der Kethulle ceux conçus en flamand. Déjà ses contemporains l'appelaient communément le seigneur de Ryhove ou Ryhove tout court, du nom de sa seigneurie, située près de Ninove et appelée aussi 't goet te Riest. Du vivant de son père, il avait hérité de cette seigneurie, que lui avait léguée sa tante Marie, veuve sans enfants de Nicolas van der Helle, seigneur de Bavichove. On ne possède pas de renseignements sur ses premières années. On sait seulement qu'il avait visité l'Allemagne. Dans son Apologie, qu'il composa en Angleterre en 1585, il dit « que dès sa jeunesse avoit esté assez aventureux gentilhomme ». Ryhove apparaît dans l'histoire pour la première fois en 1576, lorsqu'il fut chargé par les quatre membres de Flandre de traiter avec N. de Pohveiler, colonel allemand au service du roi d'Espagne, qui occupait Termonde et Ninove avec quelques troupes allemandes. Ces mercenaires étrangers, à qui l'on devait de longs mois de solde, commettaient beaucoup d'excès, et il était à craindre qu'ils ne se révoltassent comme les mercenaires espagnols, qui venaient de piller Alost et qui saccagèrent bientôt, d'une manière si horrible, l'opulente ville d'Anvers. Plusieurs fois déjà, les quatre membres de Flandre avaient vainement essayé de négocier avec Pohveiler pour débarrasser le pays de ces garnisons indisciplinées. On songea alors à Ryhove ; mais il commença par refuser cette ingrate et périlleuse mission ; « car il estoit fort n vivant à son plaisir, et ne cherchoit nulle ruse ; fort aysé, estant marié « desjà avecq sa seconde femme (1), tellement qu'il s'avoit à contenter des biens que Dieu luy avoit . donnés ; a aussy il n'estoit subject à eulx en aulcune façon et n'avoit à déservir aucun estât ny office; enfin il estoit libre n et le refusa pour plusieurs fois ». Les quatre membres réitérèrent leurs instances et Ryhove finit par céder. Il se rendit donc à Termonde, et, au bout de quelque temps, il gagna si bien les bonnes grâces des mercenaires de Pol-weiler, qu'il réussit à renvoyer la garnison allemande en payant à chaque soldat un demi-mois de gagea. Il prétend avoir couru de grands dangers à Termonde, pendant ces négociations, de la part des soldats impatients de se faire payer, et il ajoute qu'il a failli aussi y être retenu prisonnier sur l'ordre de don Juan d'Autriche. Peu de temps après, il apaisa d'autres mutineries de soldats en Flandre et en Brabant. Pour le récompenser, les quatre membres de Flandre lui conférèrent l'office de grand bailli de Termonde, « sans aulcune poursuite » de sa part, à ce qu'il déclare dans son Apologie, ajoutant avec insistance : Lequel il ne désiroit accepter, aymant « mieulx sans aucune ruse passer son temps et se donner du bon temps ; mais enfin, considérant à quoy les affaires du pays tendoient, aucuns patriots l'ont tant pressé qu'il accepta. » Tels furent ses débuts dans les affaires et dans les fonctions publiques. Il était âgé alors d'environ 45 ans. Peut-être avait-il déjà joué un certain rôle au mois de septembre 1576 lorsque son frère aîné, Guillaume de la Kethulle, seigneur d'Assche, ouvrit aux troupes envoyées par le prince d'Qrange les portes de la ville de Gand ; mais aucun contemporain ne parle explicitement de lui à ce propos et lui-même n'en souffle mot dans son Apologie. Il y dit seulement qu'il approuva hautement son frère et se rendit par là suspect aux « traîtres ». D'ailleurs, la vie politique de Ryhove ne commence, en réalité, qu'à l'époque des premiers troubles qui accompagnèrent le triomphe éphémère des calvinistes à Gand. Il était déjà grand bailli de la ville et du pays de Termonde. Avec le seigneur Jean d'Hembyze, il se mit à la tête de la faction anticatholique et s'y signala, du premier coup, par son audace et son énergie. S'il faut en croire ses paroles, la crainte « qu'on luy joueroit un mauvais tour » l'engagea à prendre cette attitude et à faire « quelque notable acte qui pourvoit redonder au service de la patrie et à son honneur... Voyant les choses aller ainsy, révoltant beaucoup en son .esprit, il ne scavoit ny boire ny menger ni dormir ». En 1577, le duc d'Aerschot avait été nommé gouverneur de la Flandre par les Etats généraux. Cette nomination ne devait pas plaire aux partisans du prince d'Orange; le duc, en effet, s'était toujours montré l'adversaire déclaré de Guillaume le Taciturne. Aussi, dès qu'il fit son entrée à Gand, Ryhove, d'accord avec Hembyze, excita contre lui les gens des métiers et les classes inférieures de la bourgeoisie; il s'efforça, par tous les moyens, d'amener une révolte et il prit prétexte de ce que les anciens privilèges de la commune, dont la résolution des Etats généraux des 21 et 22 octobre 15 76 ordonnait le rétablissement, n'étaient pas encore remis en vigueur par le duc d'Aerschot. Hembyze et Ryhove méditèrent un grand coup ; mais celui-ci alla soumettre tout d'abord son projet au prince d'Orange. I1 se rend secrètement à Anvers et y trouve le Taciturne; le prince, l'interrogeant sur'la situation de Gand, lui dit : « Eh bien, quel remède? » — « Monseigneur, je ne scay qu'ung remède », répond Ryhove, « qu'est de chasser le nouveau gouverneur le ducq d'Arscot, avecq tous ses assistens, nobles,évesques, abbés et toute la couvée. » — « Comment allez-vous ainsi à la desmolade ? » réplique le prince. Ryhove dit qu'il aimait mieux mourir vaillamment et attendre son secours de Dieu « que de vivre en esclave et en telle tribulation. » — « Je remectrai tout à la main de Dieu » , dit-il, « et j'inciterai la commune à vindicer leur liberté et privilèges qu'on les prétend jamais restituer. » Le prince replicque: «Cela ne se peult faire ainsy », et le rejette bien loing. Cependant le prince dict: « Je penseray encore sur cecy. » Le lendemain, Ryhove se présente de nouveau devant le Taciturne et lui soumet, encore une fois, son projet d'arrêter le duc d'Aerschot. Ryhove rapporte, dans son Apologie, que le prince lui demanda « s'il avoit encore le courage d'attempter et entreprendre ung cas si mal basty et de si grande importance et tant hasardeux.» Malgré les protestations réitérées de Ryhove, le prince feignit de le détourner de son projet, sans doute pour qu'on ne pût dire plus tard qu'il avait approuvé les desseins audacieux du fameux agitateur gantois. Celui-ci affirme, d'ailleurs, que le Taciturne envoya « pardessoubs la main» Marnix de Sainte-Aldegonde, son conseiller intime, pour engager secrètement Ryhove à exécuter son projet. Il lui fit dire que « s'il avoit le cœur de ce faire, il exécuteroit sans plus de parolles ». François de la Kethulle s'embarqua aussitôt sur l'Escaut pour Termonde, accompagné de Van Royen, bourgmestre de cette ville; arrivé à Termonde, il prit avec lui quatre mousquetiers et se rendit en hâte à Gand, où déjà le peuple murmurait contre le duc d'Aerschot. parce qu'il avait brutalement repoussé Hembyze, lorsque celui-ci lui avait demandé la restitution des anciens privilèges. Aussitôt rentré, Ryliove s'arme avec quelques serviteurs, descend dans la rue et crie à ses voisins et amis : « Ceulx qui m'aiment, qu'ils me suivent ! » Puis il va droit à la maison d'Hembyze. Celui-ci lui apprend que la révolte, qui avait fait mine d'éclater le jour même, s'était assoupie. « Or sus »,dit Ryhove, « il fault réparer la faulte et que chacun sollicite derechef ses amis et ses favorits pour se mettre en armes ; et je me metteray ung des premiers sur les rues pour la liberté du pays; et jetons ce joug de servitude de no'stre col et renversons du tout ceste maudite inquisition d'E'spaigne qu'on . veult introduire icy, et chassons tous ces evesques nouveaux au diable ! » Hembyze et quelques amis se laissent persuader et vont assembler leurs hommes de confiance. « Ils estoient suivis d'ung petit nombre; la plus grand part deinouroient en leurs maisons, ne sachant de quel costé qu'ils se vouloient tenir. » Ryhove ne perd pas courage et se dirige avec eux vers la prévôté de Saint-Bavon, où était logé le duc d'Aerschot. En route, ils s'emparent de l'hôtel de ville et arrivent, vers onze heures, au logement du gouverneur de la Flandre. Les gens du duc veulent les empêcher d'entrer. Ryhove, furieux de rencontrer de la résistance, s'écrie : « Bruslons les oyseaulx en leur nid ! » Surpris et effrayé, le duc d'Aerschot saute à bas de son lit et commande d'ouvrir la porte; mais aussitôt il est fait prisonnier par Ryhove lui même, qui est obligé de la protéger contre la foule exaspérée, et on le mène à la maison de Ryhove, le Serbraemsteen, situé dans la Onder strate ou rue Basse, sans lui laisser le temps de s'habiller. Plusieurs autres grands personnages du parti catholique furent arrêtés cette même nuit (28 octobre 1577) ou les jours suivants : tous furent conduits au Serbraemsteen, et, notamment. François de Halewyn, seigneur de Zweveghem ; Ferdinand de la Barre, seigneur de Mouscron, grand bailli de Gand; Maximilien Vilain, baron de Rasseghem; le conseiller Jacques Hessels; Martin Rithovius, évèque d'Ypres, et Rémi Driutius, évêque de Bruges, qui étaient tous plus ou moins hostiles à la politique du prince d'Orange. Pour empêcher une réaction à Gand même en faveur des prisonniers, Ryhove avoue qu'il a fait « en toute diligence enrouller trois cents vagabonds en la ville et leur donner les armes en mains ». La nouvelle de cet attentat, commis sur des personnages aussi considérables et qui de plus étaient inviolables en tant qu'ils remplissaient alors à Gand les fonctions de membres des Etats de Flandre, causa partout beaucoup d'émotion. Les Etats généraux envoyèrent à Gand des députés pour protester contre l'arrestation des seigneurs catholiques et pour demander leur mise en liberté immédiate. Les Etats généraux écrivirent même au prince d'Orange une lettre pressante pour qu'il se rendît à Bruxelles, et ils lui députèrent Philippe vander Meren, seigneur de Saventhem, avec le secrétaire Jean Asseliers, pour lui demander de faire une démarche auprès des Gantois en faveur des seigneurs prisonniers. Cependant Ryhove n'était pas du tout d'avis de remettre en liberté ceux qu'il détenait dans son hôtel; deux jours après l'arrestation du duc d'Aerschot, il reçut encore des renforts de la Zélande, et il fit prêter serment de fidélité aux milices communales ; alors, maître de la ville, il institua, sur le modèle de ce qui avait été fait à Bruxelles, une commission extraordinaire composée de dix-huit calvinistes, qui prit la direction générale des affaires (1er novembre 1577). Dès lors, on remit en vigueur les anciens privilèges confisqués par Charles-Quint en 1540, après la révolte des Gantois, et on gouverna en faveur des anciens proscrits du duc d'Albe, revenus en masse, aigris par l'exil et par les cruelles persécutions dont eux-mêmes, leurs proches et leurs coreligionnaires avaient été victimes. Ce ne fut que le 10 novembre 1577, que Ryhove et ses amis, cédant aux instances réitérées des Etats généraux, du prince d'Orange, des quatre membres de Flandre et de la ville d'Anvers, consentirent à relâcher le duc d'Aerschot; mais tous les autres seigneurs restèrent prisonniers pendant assez longtemps encore. La conduite de Ryhove à l'égard de ces derniers fut loin d'être magnanime : grâce aux Mémoires de François de Halewyn, nous savons qu'il les traita avec une brutalité haineuse. Halewyn l'accuse même d'avoir pris plaisir à leur inspirer de fausses terreurs au sujet des dangers qui les menaçaient. Un jour que plusieurs corps de troupes parcouraient la ville, Ryhove alla le visiter ; comme le seigneur de Zweveghem lui demandait ce que signifiaient tant de tambourins que l'on entendait par les rues, Ryhove lui répondit que c'étaient cinq compagnies de bourgeois qui venaient pour massacrer les prisonniers; et il sortit de la chambre en laissant Halewyn » en telle appréhension ». Sa sœur Jeanne de la Kethulle, veuve de Louis de Walle, seigneur de Mortaigne, usa également de menaces à l'égard des prisonniers. Enfin, Ryhove força plus tard, en avril 1579, les seigneurs prisonniers à lui payer des sommes exorbitantes pour les dépenses qu'il disait avoir faites à l'occasion de leur logement et de leur entretien. Le prince d'Orange arriva, le 29 novembre 1577, au milieu des Gantois, qui venaient de se prononcer pour lui avec tant d'énergie. Ryhove et Hembyze, suivis du magistrat et de toutes les autorités de la ville, le reçurent en grande pompe au milieu d'une population enthousiaste. Le Taciturne présida au renouvellement du magistrat et Jean d'Hembyze fut nommé premier échevin. Peu de temps après la visite du prince d'Orange, Ryhove prit à cœur d'attirer dans son parti toutes les villes de la Flandre. Il résolut de commencer par Bruges, où dominait la faction catholique; d'ailleurs, les Brugeois n'étaient pas bien disposés envers les Gantois qui venaient de commencer à molester le clergé et ses fidèles ; c'est pourquoi Ryhove et son frère aîné, Guillaume de la Kethulle, seigneur d'Assehe, résolurent de recourir à la force. Le 19 mars 1578, le seigneur d'Assehe, colonel de Gand, et Ryhove lui-même, accompagnés de 100 cavaliers et de 1,000 fantassins, marchent nuitamment sur Bruges, où ils arrivent le lendemain, vers quatre heures du matin, devant la Kruispoort. Le commandant brugeois Gilles Mostaert, partisan du prince d'Orange, était entré en relations avec Ryhove et lui avait assuré son appui; il lui ouvre aussitôt la porte de la ville et Ryhove, suivi de ses soldats, se rend droit à la place du Bourg et entre à l'hôtel de ville, où il trouve le magistrat, qui s'y était assemblé en hâte à la nouvelle de l'entrée des Gantois. Ryhove s'assied à côté du bourgmestre et déclare que l'archiduc Mathias et les Etats généraux l'ont chargé de s'assurer de Bruges et de changer la forme du gouvernement de la ville, ainsi que cela s'était fait à Gand. Aucun des membres du magistrat brugeois n'osa protester, la salle étant occupée militairement, et Ryhove installa immédiatement une commission des dix-huit. Cela fait, il divisa ses soldats en petites troupes qu'il fit héberger par les catholiques les plus en vue et par les couvents. Il resta à Bruges jusqu'au 7 avril; avant de partir, il renouvela complètement le magistrat, sous prétexte qu'il en avait reçu l'ordre de l'archiduc Mathias ; pendant ce temps on pillait les églises de Sainte-Croix et de Sainte-Catherine, ainsi que plusieurs couvents.Van Campene dit qu'il se surmena à Bruges et que la fatigue le rendit malade. Ryhove insinue, dans son Apologie, qu'il fut victime d'une tentative d'empoisonnement. Le 8 avril 1578, il rentra à Gand, couché dans une litière, et il y fut reçu avec enthousiasme par les soldats, qui le conduisirent jusqu'à sa demeure en tirant des salves de mousqueterie. En toute-circonstance, l'armée se montrait fort attachée à Ryhove : c'est ainsi que, le 1er et le 3 du mois suivant, les soldats vinrent planter joyeusement « l'arbre de mai » devant son hôtel de la rue Basse. Il veillait avec soin à la bonne organisation de l'armée gantoise. Le 10 mai 1578, il voulut même éprouver la valeur de ses soldats : pendant la nuit, i1 fit battre le tambour , tirer un coup de canon et décharger des mousquets; bourgeois et soldats se mirent aussitôt en armes et vinrent se ranger devant l'hôtel de ville, devant la prison des seigneurs catholiques, au marché et aux portes de la ville. Cette fausse alarme causa malheureusement la vie à quelques personnes : « Plusieurs femmes enceintes », dit Van Campene, « ac-couchèrent avant le temps ; d'autres moururent de peur. » Et les pasquilles catholiques donnèrent à l'auteur de cette alerte nocturne le sobriquet ironique d' alaermslaghere. Les calvinistes dominaient de plus en plus la ville de Gand et leurs pasteurs s'étaient mis à prêcher publiquement. D'un autre côté, les moines et le clergé étaient sans cesse molestés. Le 18 mai 1578, jour de la Pentecôte, on s'attaqua ouvertement aux monastères, et les soldats de Ryhove saccagèrent le couvent des Dominicains avec sa complicité et celle des dix-huit, s'il faut en croire Van Campene. Ryhove, d'autre part, d'accord avec Hembyze et les dix-huit, démit de leurs * fonctions plusieurs de ceux qui étaient suspects aux protestants, et les remplaça par des calvinistes (18 juillet 1578). Il continuait à faire, en Flandre, de petites expéditions de ville en ville pour amener celles-ci dans le parti du prince d'Orange; mais, le 1er août 1578, il s'en revint de Lille, dont il avait tenté en vain de s'emparer. Vers le même temps, on amena à Gand Frédéric Per-renot, seigneur de Champagny, frère du cardinal Granvelle, liv-ré comme prisonnier aux Gantois par le magistrat de Bruxelles. Champagny fut conduit à la maison de Ryhove, que les seigneurs prisonniers avaient quittée pour la Cour du Prince et pour la prison communale du Châtelet. Le 25 septembre, on emprisonna, aussi au Serbraewstèen la veuve du seigneur de Glayon, chevalier de la Toison d'or, avec ses filles et ses dames d'honneur. Le vaste hôtel de Ryhove servait ainsi sans cesse de prison d'Etat aux calvinistes gantois. Ici se place, dans la vie de Ryhove, un a.cte qui a révolté la postérité plus encore que les contemporains, parce que ceux-ci étaient blasés en fait de cruautés par l'inquisition et par le duc d'Albe. Parmi les seigneurs prisonniers se trouvait le conseiller Jacques Hessels, vieillard de soixante-douze ans, qui, sous le règne de Charles-Quint, avait persécuté les protestants des diverses sectes avec une rigueur implacable; il avait fait partie plus tard de l'odieux Conseil des Troubles du duc d'Albe, et c'est lui qui avait rédigé la sentence de mort des infortunés comtes d'Egmont et de Homes. Les calvinistes gantois, dont il avait traqué et fait brûler les proches et les amis, l'avaient en horreur. Un de ses compagnons de captivité, Jean de Visch, bailli d'Ingelmunster, leur était aussi odieux pour des motifs analogues. Ryhove, qui était sur le point de partir pour Courtrai à la tête d'un petit corps d'armée, résolut de mettre ces deux ennemis acharnés des protestants dans l'impossibilité de leur nuire à l'avenir. Il raconte lui-même dans son Apologie qu'il s'en ouvrit à son ami Hembyze et à quelques hommes sûrs : « Je m'en va asteure vers Courtray », leur dit-il. « Je puis mourir à la guerre ou de maladie. Nous dé-tenons icy prisonniers les deux tirans Hessel et Visch, qui ont toujours esté contraires à poursuivre les gens de la religion. Si a Hessel prononcé la sentence de monseigneur le comte d'Egmont et de monseigneur le comte d'Home, mon bon maître, et a sou-ventes fois menacé le prince d'Orenge le tirer à l'extendre un pied plus long qu'il estoit. Il me feroit mal de mourir que telle peste me survi-veroit. Partant, si vous trouvez bon (ils ont faict mourir tant maints inno-cents sans forme aucune de justice), je les prendray avec moy et les attache. ray à un arbre. » Hembyze et ses amis . l'approuvèrent, car Hessels dans sa prison jurait, disait-on, par sa barbe grise, de les faire tous pendre un jour. Il aurait même dit à Ryhove un an auparavant : « Jamais vous ne porterez barbe si blanche que moi. » Le 4 octobre 1578, de bon matin, Ryhove donna l'ordre à Guillaume van der Meulen, prévôt de son régiment, de lui amener Hessels et de Visch, qui étaient détenus au Châtelet. Hessels voulut s'habiller pour paraître devant Ryhove et » changer de mules «, comme le rapporte Halewyn dans ses Mémoires; mais le prévôt lui dit qu'elles n'étaient que trop bonnes pour le chemin qu'il avait à faire. On fit monter Hessels et de Visch dans une voiture qui passait et qu'un gentilhomme avait louée pour aller à Courtrai avec sa femme. Ryhove et sa troupe les conduisirent ainsi à une demi-lieue hors de la ville, à la barrière de Saint-Denis-Westrem, au lieu dit Maelte, où se trouvait un massif de chênes. Là on les fait descendre, on dépouille Hessels de sa robe de nuit et on le fait monter sur une échelle dressée contre un chêne. Par une cruelle ironie, Ryhove lui . fit alors couper sa longue barbe blanche par un barbier, et, la répartissant en trois, il en mit une partie sur son chapeau et donna le reste au capitaine Myghem et à un troisième, qui, à leur tour, en parèrent leur chapeau. Puis, il fit pendre Hessels et de Visch à l'instant même, sans confession et sans autre forme de procès. En manière d'oraison funèbre, Ryhove s'écrie dans son Apologie : « Pleust à Dieu qu'on en eust encore pendu beaucoup de telle farine de gens ! Le pays s'eust mieulx. porté. » Les contemporains catholiques, dans leurs chansons indignées, le nommèrent l'assassin (den moordre) et le comparèrent à Néron. D'après les Mémoires de Halewyn, Ryhove porta encore pendant plusieurs jours les flocons de la barbe blanche de Hessels à son chapeau, et « faisoit largesse de quelcque poil d'icelle à aulcuns de son humeur, pour en décorer aussy leur chappeau, et, entre les aultres, au seigneur de Vychte, par lui faict colonnel de queleques compagnies de paysans. » De son côté, le capitaine Myghem serait allé, le 5 octobre, menacer les seigneurs catholiques dans leur prison en leur faisant entrevoir pour eux-mêmes le sort de celui « duquel j'ay charge », dit-il, « de vous espandre icy la barbe » ; et en ce disant, il la sépara et sema parmy la salle aux pieds des prisonniers. » S'il faut en croire les satires politiques composées par ses ennemis, Ryhove regretta bientôt ce qu'il avait fait et fut rongé par le remords. Cependant, Hembyze, appuyé sur les pasteurs et sur les calvinistes ardents, persécutait sans cesse les catholiques auxquels on avait interdit la célébration publique de leur culte dans les églises, celles-ci avaient été cédées aux protestants ou employées à d'autres usages. Le 9 novembre 15 78, le ministre calviniste Hermân Busschius prêcha, à Saint-Bavon, que le catholicisme était une idolâtrie que l'autorité ne pouvait tolérer, et que les catholiques devaient s'estimer heureux de conserver la vie, alors que, peu d'années auparavant, ils livraient les protestants aux flammes. En même temps, les Etats généraux avaient envoyé leurs députés à Gand pour faire cesser ces excès. Ils exigeaient la restitution des biens ecclésiastiques saisis, le rétablissement du culte catholique dans plusieurs églises et la mise en . liberté desévêques de Bruges et d'Ypres. Hembyze s'y opposa énergiquement et entraîna le magistrat à. résister aux injonctions formelles des Etats généraux, qui agissaient d'accord avec l'archiduc Mathias et le prince d'Orange (13 novembre 1578). C'est alors que se produit un revirement décisif dans laconduite de Ryhove : lui qui, jusqu'alors, avait été parmi les adversaires les plus acharnés des catholiques et qui avait commis ou laissé commettre tant d'excès contre eux, devint aussitôt le partisan de la modération et l'ennemi d'Hembyze, qui ne voulait faire aucune concession aux catholiques. Ce changement de politique de Ryhove fut dû sans aucun doute à l'influence que le prince d'Orange exerçait sur lui ; il se mit à la tête d'un nouveau parti, inclinant à la pacification religieuse et appuyé surtout sur les échevins des par-chons et sur les notables, qui avaient compris, comme le, Taciturne, que l'intolérance des protestants gantois, si elle se prolongeait, amènerait la ruine du pays et la perte de l'indépendance nationale. Dès ce moment, l'entente la plus parfaite existe entre le prince et Ryhove; et celui-ci montre dans la suite, à l'égard du Taciturne, une obéissance passive, une docilité à toute épreuve. Il le proclame hautement lui-même dans son Apo. logie : « II se gouverne du tout selon le commandement du prince d'Orange. » Mais Ryhove rencontra une résistance énergique dans la personne de son ancien ami Hembyze.qui s'appuyait sur les ministres protestants, sur les calvinistes ardents et sur la populace, dans le but de maintenir son pouvoir dictatorial comme premier échevin de Gand. Malgré les instances de ses propres frères, de Ryhove et de beaucoup de « gens de bien », Hembyze refusa itérativement de se conformer aux ordres du prince d'Orange et des Etats généraux : « II rejettoit tout, » dit Ryhove dans son Apologie, « et ne voloit en aucune manière prester deue obédience. » S'il faut en croire la même Apologie, le prince d'Orange résolut alors d'agir énergiquement contre Hembyze; il écrivit à Ryhove et à plusieurs autres personnages qu'il fallait le faire arrêter. Ryhove dit avoir été « fort esbahy du contenu de la lettre ». Le lendemain matin (18 novembre 1578), ses soldats vinrent se ranger devant son hôtel, où Hembyze devait se rendre pour conférer avec le magistrat. Lorsque le premier échevin arrive, Ryhove le prend à part et le conduit dans une galerie avec son frère, Roland d'Hembyze, secrétaire de la ville, qui avait épousé Adrienne de la Kethulle, propre sœur de Ryhove. Tous deux conjurent le chef des calvinistes irréconciliables de cesser son opposition factieuse contre les Etats généraux et le prince d'Orange. Mais Jean d'Hembyze reste sourd à leurs instances. Enfin , Ryhove lui dit : « Vous estes mon amy; mais nous ne nous voulons tous perdre pour vous; et luy présenta la lettre et à son frère que le prince avoit escript. » Aussitôt Hembyze veut s'enfuir, mais Ryhove lui déclare qu'il ne sortira que s'il promet au moins au magistrat qu'il présentera des excuses au prince d'Orange. Pendant ce temps, un des serviteurs d'Hembyze, ayant eu vent de ce qui se passait, sort de l'hôtel de Ryhove et va répandre l'alarme parmi ses adhérents. Les deux partis prennent les armes et Ryhove est obligé de relacher Hembyze. Le tumulte se prolongea jusqu'au soir, et Pierre Dathenus, l'un des pasteurs les plus fougueux, prenant peur, se fit ouvrir une porte de la ville et s'enfuit en Allemagne. Quelques jours après, Ryhove fut cité à comparaître à l'hôtel de ville devant le magistrat. Hembyze, qui présidait l'assemblée, « et estoit à la fois accusateur, examinateur et juge », lui demanda compte de l'émeute qu'il avait provoquée. Ryhove en rejeta la faute sur son accusateur, qui avait refusé d'obéir au prince d'Orange,quoique par amitié Ryhove ne l'eût pas fait arrêter en traître, mais lui eût montré la lettre. Hembyze nia avoir reçu communication de cette lettre, et Ryhove fut obligé d'appeler en témoignage Roland d'Hembyze, le seul témoin de leur entretien, qui ne s'en fit pas prier. « Vous estes », dict-il au sieur d'Ymbize, « mon frère, et j'ay espousé. la sœur de Ryhove; mais j'atteste en foy de gentil-homme que vous les avez leues et moy aussy dedans la gallerie. » Hembyze, convaincu d'imposture, entra dans une grande colère, et tentant de couper court par un trait d'audace, il s'écria : « Monsieur de Ryhove, messieurs qui sont icy trouvent bon que vous vous retirez à la chambre du concierge. » — Ryhove répondit: « J'entens bien; ce seroit en prison. Il n'y a nulle prison pour moy. » Et il porta la main à son épée. Là-dessus les échevins présents s'efforcèrent d'empêcher les deux adversaires d'en venir aux mains; grâce à l'intervention de Josse Triest et de Vleeschauwer,, une réconciliation eut lieu sur-le-champ ; Ryhove et Hembyze se donnèrent la main, s'embrassèrent et burent, « comme on dit, la paix, pour confirmer leur amitié, à la mode du pays.». Ce n'était, il fallait s'y attendre, qu'une réconciliation apparente : la tentative faite par Ryhove dans le but d'arrêter le chef du parti calviniste, avait eu pour résultat de rendre plus sensible encore la scission qui s'était produite entre les Gantois. L'agitation continua les jours suivants dans les rues, et les troupes de Ryhove semblent n'avoir contenu les ultra-calvinistes, qu'en occupant militairement les points principaux de la ville avec des canons chargés à mitraille, et en tendant les chaînes dans les grandes voies de communication. Ryhove ne parvint cependant pas à dominer définitivement la situation; il se rendit alors à Anvers, auprès du prince d'Orange, pour lui demander conseil : le prince promit de se rendre à Gand, afin d'y rétablir la concorde parmi les bourgeois. Le 2 décembre 1578, le Taciturne, accompagné du comte palatin Casimir, y fit son entrée solennelle. On forma alors, une commission de treize délégués, pris parmi les échevins des deux bancs et parmi les trois membres de la ville, afin de traiter avec le prince d'Orange. Un accord fut bientôt conclu. Hembyze, qui faisait partie de cette commission, s'inclina devant les volontés du prince, et trois points furent arrêtés :1° la tolérance religieuse sera garantie aux deux cultes ; 2° les seigneurs prisonniers seront conduits « in neutrale plaetsen » ; 3° la ville de Gand restera dans l'union, générale des provinces et concourra à la défense commume du pays. Le parti de Ryhove, qui, dès le mois de novembre, aurait voulu faire accepter la Paix de religion, remportait donc l'avantage, grâce à l'intervention énergique du Taciturne. Cette Paix de religion fut ratifiée par la Collace, le 16 décembre 1578, et, le 27 du même mois, le prince d'Orange la fit publier solennellementdevant le peuple, du haut de l'hôtel de ville ; elle fut imprimée, répandue dans le public et distribuée aux échevins et aux députés des trois membres de la ville. En voici la teneur succincte : Le libre exercice des deux religions rivales est autorisé ; catholiques et protestants reçoivent six églises pour y célébrer publiquement leur culte en plein jour, sans faire de processions à l'extérieur; les ordres monastiques cloîtrés célébreront leurs offices dans leurs couvents, à portes fermées; les locaux scolaires seront attribués, par parts égales, aux catholiques et aux protestants; les sermons injurieux, les chansons satiriques, les attaques de toute nature sont sévèrement défendus de part et d'autre ; quatre notables catholiques et quatre notables protestants veilleront à l'observation de ces prescriptions de concert avec les échevins; les fonctionnaires civils et militaires, les ministres protestants et les dignitaires du clergé catholique promettront sous serment de ne pas enfreindre cette Paix de religion. Le 1er janvier 1579,'le culte catholique fut rétabli. Ryhove et ses adhérents triomphaient. Le 7 janvier, il présida à l'entrée solennelle de la princesse d'Orange, et les deux illustres époux restèrent à Gand jusqu'au 19 du même mois. Mais le parti radical, dirigé par Hembyze,ne s'était soumis qu'en apparence : peu de temps après, l'agitation anticatholique recommença; le 10 mars 1579, plusieurs calvinistes se mirent à chasser les prêtres des églises qui avaient été rendues aux catholiques, et à y briser les images. Pendant la semaine sainte, les catholiques gantois furent même obligés de se rendre à Anvers et à Alost pour y faire leurs Pâques. Les seigneurs et les évêques prisonniers, que Ryhove avait conduits à Termonde en janvier, furent brutalement ramenés par lui à Gand, où la populace et les enfants les huèrent sur leur passage jusqu'à la Cour du Prince (1 er avril 1579). En juillet, tous les fonctionnaires de la ville furent obligés de faire une profession de foi protestante : ceux qui refusèrent, reçurent leur démission.Ryhove, craignant d'être arrêté, quitta précipitamment la ville, le lendemain même des noces de sa fille Catherine, qui venait d'épouser Jean de Fiennes, seigneur d'Hersecques. L'autorité d'Hembyze s'accroissant de jour en jour, il se crut assez puissant pour faire un coup d'Etat. Le 28 juillet 1579, il ordonna de fermer toutes les portes, se rendit à l'hôtel de ville, procéda lui-même, avant l'époque régulière, au renouvellement du magistrat, et, quoiqu'il ne fût pas rééligible, il se fit continuer dans la charge de premier échevin. Cependant les nouveaux magistrats nommés par Hembyze n'agirent pas suivant ses désirs, lorsqu'il fallut répondre à une lettre que le prince d'Orange leur avait adressée : en effet, malgré l'opposition formelle d'Hembyze, ils résolurent d'inviter le Taciturne à se rendre à Gand. C'est à cette occasion qu'Hembyze accusa le prince d'Orange de vouloir placer les Gantois sous la domination française. Dès le commencement de la dictature d'Hembyze, Ryhove avait été mandé à Anvers auprès du prince d'Orange, pour conférer avec lui. D'ailleurs, le parti modéré était très mécontent et conjurait le prince de se rendre à Gand. Le Taciturne annonça bientôt son arrivée, et, le 18 août 15 79, il fit son entrée solennelle. Les dix-liuit, Hembyze et tous ceux qui avaient reçu quelque charge de lui, furent déposés; ses gardes furent désarmés et le magistrat fut régulièrement renouvelé (20 août). Mais, le 26, la populace calviniste envahit l'hôtel de ville, réclamant le retour d'Hembyze à la tête du magistrat; et, excitée par certains ministres calvinistes, elle alla faire des manifestations hostiles sous les fenêtres du prince d'Orange. L'émeute fut cependant vaincue sans peine; et Hembyze, à qui le prince d'Orange avait pardonné son coup d'Etat sur les instances de Ryhove et de plusieurs notables, s'humilia, quitta la ville et se réfugia en Allemagne, au château de Frankenthal, auprès de l'électeur palatin, qui avait déjà accueilli Dathenus. D'après l'Apologie, Hembyze aurait dit en partant : « Je m'en vay; je vous prie, adhérés entre vous tousjours à Ryhove, car je l'ay trouvé bien affectionné à la cause du pays et est de bon conseil. Je me respens bien que je n'ay sou-ventesfois suivy son conseil ». Mais les calvinistes exaltés continuèrent à molester les catholiques et à envenimer les choses. D'autre part, les Malcontents s'approchaient déjà de Gand, et Ryhove guerroyait sans cesse contre eux par toute la Flandre, dans des escarmouches obscures et souvent malheureuses. A Gand,il était le personnage principal depuis l'exil d'Hembyze. Le 14 mars 1580, nous le voyons, accompagné de sa cavalerie, recevoir solennellement le ' jeune prince de Condé ; le 7 juillet, celui-ci repousse, avec Ryhove, un grand assaut nocturne tenté par surprise par l'armée des Malcontents, qui avaient des intelligences secrètes parmi les catholiques gantois. Le 13 août 1580, Ryhove reçoit en grande pompe le Taciturne, qui arrivait à Gand pour le renouvellement annuel du magistrat ; et, le 1er septembre, il est nommé par lui grand bailli de la ville de Gand, ce qui grandit encore sa situation déjà si considérable; le 30, nous le voyons assister comme tel à l'exécution d'un condamné. En même temps,Ryhove se trouvait à la tête des forces militaires de la ville et réclamait des sommes énormes pour l'entretien de ses troupes; peut-être s'en réserva-t-il une partie pour son usage personnel; en toutcas, ses ennemis chansonnèrent plus d'une fois sa cupidité, qui provoqua même un esclandre public : le 9 mai 1581, rapporte Van Campene, les capitaines des mercenaires français lui lancèrent force injures, tandis que la populace lui reprochait aussi son avidité. Quoiqu'il en soit, le 31mai 1581, les échevins des deux bancs et les grands doyens déclarèrent par lettres patentes que Ryhove méritait une récompense publique pour avoir préservé Gand, en 1576,. d'un sac semblable à celui d'Anvers, en licenciant les mercenaires de Polweiler ; pour avoir maintenu dans l'union la plupart des villes de la Flandre et pour avoir sans cesse exposé sa vie et l'avenir de ses enfants clans les expéditions contre les Malcontents; c'est pourquoi on lui accordait, ainsi qu'à ses fils Philippe et Louis et à ses filles Catherine et Jeanne, des pensions viagères dont le total dépassait cinq mille trois cents florins, hypothéqués sur les biens ecclésiastiques. Ryhove se vante d'avoir obtenu ces pensions grâce à l'estime dans laquelle le tenait le prince d'Orange : « Aussy le prince avoit ceste considération que, si Ryhove eust été prisonnier des ennemis, tout l'or des Indes ne suffisoit pas pour sa rançon ; car il n'y a rançon pour luy ». Le 4 juillet 15 81, Ryhove se rendit à Termonde pour apaiser les dissensions qui avaient éclaté entre les bourgeois et la garnison. Le 12 août 1581, il alla, accompagné du magistrat, à la rencontre du prince d'Orange, et, le 16, il offrit, dans son hôtel de la rue Basse, un grand banquet au Taciturne. Au mois d'octo- ' bre, le prince revint encore une fois à Gand, où il fut festoyé de la même manière par Ryhove. Celui-ci jouissait de toute sa confiance ; c'est ainsi qu'on voit le prince d'Orange, dans une lettre du 19 décembre suivant, mettre le magistrat de Gand en garde contre les traîtres et le prier de faire surveiller étroitement par Ryhove, les menées de Champagny. En présence de la tiédeur des princes protestants d'Allemagne et des hésitations de la reine d'Angleterre, le prince d'Orange se décida à s'appuyer sur la France et à appeler le. duc d'Alençon, frère du roi, pour le mettre à la tête des Pays-Bas. Ce prince catholique inspirait de vives méfiances aux calvinistes; de plus, l'alliance française était très impopulaire dans les masses, surtout en Flandre. Ryhove, toujours dévoué au prince d'Orange, le soutint du mieux qu'il put. Et quand le duc d'Alençon s'avança vers Gand avec le prince d'Orange, pour y être inauguré comme comte de Flandre, ce fut Ryhove qui alla le recevoir solennellement, accompagné du magistrat de la ville, le 20 août 1582. En sa qualité de grand-bailli, il portait devant le. duc d'Alençon la longue verge blanche de justice. Mais au mois de janvier suivant, Alençon, trompant le prince d'Orange et tous ceux qui avaient eu foi en lui, tenta son coup d'Etat et échoua dans la Furie française, à Anvers. Il dut quitter cette ville avec une partie de ses troupes et se réfugia aux environs de Gand; Ryhove, comme chef de l'armée gantoise, fit tous ses efforts pour protéger la ville contre les soldats de celui qu'il avait reçu six mois auparavant en grande pompe et devant qui il avait porté la verge de justice. Sur ces entrefaites, Alexandre Farnèse, prince de Parme, l'habile gouverneur général de Philippe II, proposa aux Gantois irrités de négocier une réconciliation avec l'Espagne. Ryhove, resté inébranlable dans sa fidélité aux Etats généraux et au prince d'Orange, s'y opposa énergiquement. Il voulait renvoyer, sans les ouvrir, les lettres qui étaient adressées par Farnèse au magistrat de la ville; mais celui-ci en décida autrement. D'autres lettres suivirent, et Ryhove raconte lui-même qu'un jour il s'empara de celles qu'un tambourin du prince de Parme apportait; il les déchira et les brûla à l'instant même. Comme le messager lui demandait une réponse, il s'écria : « Fault-il autre response? Dictes au prince de l'arme que je sau-roye autant brusler en une heure que tous ses secrétaires sauraient escripre en ungan entier ». Mais le magistrat, les doyens des métiers, les colonels et les capitaines de la ville furent mécontents des agissements de Ryhove, et on continua malgré lui les négociations avec l'ennemi espagnol. S'il faut en croire Ryhove, les partisans de la réconciliation avec le prince de Parme auraient même comploté de laisser surprendre la ville par les Malcontents, dès le mois d'octobre 1582. Faisant un jour sa ronde sur le rempart, il entend un bruit suspect, éperonne son cheval et arrive à l'endroit où l'ennemi avait massé ses troupes. Ryhove les repoussa à coups de canon ; mais il ne récolta que des reproches de la part de ceux, qui auraient voulu voir réussir la surprise, afin de conclure la paix avec l'Espagne. Cependant l'in-rluence du prince d'Orange baissait de jour en jour à Gand : « L'aigreur croist contre le prince pour le mal que les Franchois avoient faict, et aulcuns tant de la religion que du magistrat « s'oublient de leur devoir ». La fidélité de Ryhove, qu'on essaye en vain de faire fléchir par la corruption, à ce qu'il affirme, le rend odieux, ses ennemis « faisant entendre que feraient bien une bonne paix, mais que Ryhove seul les empeschoit et resistoit à l'encontre ». Ryhove, découragé, se retire à Termonde. Après la Furie française d'Anvers, l'opposition à lapolitique du prince d'Orange était devenue universelle à Gand. Plusieurs fois, Ryhove s'y rendit pour tâcher de ramener les esprits au Taciturne ; mais, deleurcôté, les calvinistes faisaient tous leurs efforts pour le convertir lui-même : « Ils pensoient persuader à Ryhove qu'il devoit abandonner le prince et les Estais et qu'il estoit enfin autrement fort bien aymé de la commune, voire de tous. Ryhove dict qu'il n'abandonnerait jamais le prince ny les Estats tant qu'ils maintiendroient la religion, et qu'ung pays ne se povoit bien porter, lequel ne voloit obéyr aux supérieurs ». Van Cam-pene raconte que, le 16 février 1583, on tint fermées les portes de la ville, par crainte d'un coup de main de Ryhove, et que, le 26 mars, le magistrat fit défendre, à son de trompe, de semer des pasquilles et des chansons injurieuses contre Ryhove ainsi que contre Alençon et Orange. Dans une lettre du 9 avril, le Taciturne est obligé d'insister vivement auprès des échevins de Gand pour qu'on paye la solde des troupes de Ryhove, restée en souffrance depuis longtemps. Le même jour, Ryhove écrivait de Termonde au magistrat gantois une lettre flamande, dans laquelle il se plaint amèrement d'être laissé sans secours et de se voir refuser l'argent dû à ses soldats, alors qu'on paye ceux des autres capitaines au service de la ville. Il s'écrie avec douleur: « Ie, die ulieden ghetrauwelick ghedient hebbende, continueeren zal mette r gracie Gots totten doot, blyve vergheeten ! » Le Taciturne, désespérant de ramener l'union et voyant les armées du duc de Parme faire des progrès continus en Brabant et en Flandre, quitta Anvers et se retira dans les provinces septentrionales. Son départ précipita les choses à Gand. Lors du renouvellement annuel du magistrat, le 14 août 1583, Hembyze absent fut nommé premier échevin ; et quand, suivant l'usage, on proclama du haut de l'hôtel de ville les noms des nouveaux élus, le peuple accueillit celui d'Hembyze par des acclamations si bruyantes qu'on n'entendit même pas les noms des échevins suivants. Mais Hembyze qui était alors au fond de l'Allemagne, n'arriva à Gand que deux mois plus tard. Ryhove, auparavant, avait fait une dernière tentative en faveur de la politique du prince d'Orange. Le 20 octobre 1583, venant de Termonde à la tête d'un fort détachement de troupes destiné à appuyer sa démarche, il se présente devant la ville ; mais le magistrat tient les portes fermées et ne laisse entrer que Ryhove, accompagné de son lieutenant, après avoir promis de les laisser ressortir quand bon leur semblerait. Refoulant son dépit et comptant encore sur son ancienne popularité et sur le dévouement des « bons », comme il les appelle, Ryhove se présente devant le magistrat malgré l'heure avancée de la soirée « pour tousjours les induire à estre constans et léaulx au prince et à leur patrie, et pour le maintiennement de la religion ». Dans son Apologie, il rapporte complaisamment le long discours qu'il prononça alors et qui fut autant un plaidoyer pro domo que pour la politique du prince d'Orange. Ryhove se défendit d'être « trop Oraniste » et « francisé », et conjura les échevins de ne pas se séparer des Etats généraux ni du Taciturne. L'échevin Triest lui répondit en attaquant violemment le prince d'Orange; et, comme « il commençoit faire tard sur lanuict ». on remit la suite de la délibération au lendemain. Celle-ci fut reprise « du grand matin » à l'hôtel de ville ; mais Ryhove y fut éconduit et on essaya de se débarrasser de lui en lui ordonnant d'aller occuper Axel et Hulst avec ses soldats. Un jour se passa encore en négociations vaines; et Ryhove faisait déjà battre le tambourin pour s'en retourner à Termonde avec sa petite armée, toujours campée devant Gand, lorsqu'un batelier lui apprit le retour inopiné d'Hembyze (24 octobre 1583). Par politique, Ryhove court chez lui l'embrasser et le féliciter; il y trouve Triest et quelques autres; et « à leur contenance il lui sambloit bien qu'ils praticquoient quelque chose de sinistre contre luy ou la patrie ». Après quelques compliments aigres-doux,on se sépare. Ryhove va à son hôtel et vers midi il envoie demander à Hembyze de lui faire ouvrir la porte de la ville pour se retirer à Termonde. Il reçoit les meilleures assurances, mais on le tient « plus que deux grosses heures » devant la porte close. Impatienté, il se promenait à cheval sur le rempart ; plutôt que de se laisser arrêter par son ennemi mortel il méditait de sauter avec sa monture dans le fossé : « Sachant qu'il ne povoit faire cela sans grand danger de sa vie, il réclame Dieu en sa nécessité et il jette sa veue vers les champs tout alentour de luy ; il regarde encore le lieu de sa naissance qui estoit ung petit lieu distant de la ville seulement et le plus prochain village de la Mudeporte par où il sortoit ». Par un heureux hasard on dut ouvrir la porte, afin de faire entrer un convoi de chariots. Ryhove aussitôt piqua des deux et s'enfuit à bride abattue; il était encore sur le pont-levis, quand un hallebardier ; d'Hembyze, qui apportait l'ordre de l'arrêter, s'écria : « Morbleu, vous avez laissé eschapper l'oiseau. » Rentré à Termonde, Ryhove apprit que des commissaires, envoyés par Hembyze, y avaient déjà intrigué en son absence pour détacher de lui ses troupes et le magistrat de la ville. A sa vue, ces commissaires, qui le croyaient retenu à Gand, s'écrient : « Comment est-il possible ? Cet homme a-t-il des ailes pour voller? » Mais Ryhove les fait arrêter; et, lorsque, quelques jours après, les Gantois lui réclament leur mise en liberté, il n'en relâche qu'un sur trois, retenant les deux autres en otages. Cependant Ryhove ne désespérait pas encore de la ville de Gand. Il y envoya son fils aîné Philippe, afin de négocier avec le magistrat ; mais le jeune homme fut fait prisonnier dès qu'il entra à Gand, et plus tard on l'envoya deux fois en otage au prince de Parme. Comme la solde de ses troupes n'était plus payée, Ryhove arrêtait sur l'Escaut les bateaux gantois et les confisquait. Hembyze, de son côté, essayait d'amener la garnison de Termonde à abandonner Ryhove. Son pouvoir à Gand commença, du reste, à faiblir peu de temps après; enfin, le 23 mars 1584, se produisit un grand soulèvement. Convaincu d'entretenir une correspondance secrète avec le prince de Parme, Hembyze fut accusé d'avoir voulu trahir la ville et fait prisonnier à l'hôtel de ville. Son procès fut instruit et, au mois d'août, Hembyze porta sa tète grise sur l'échafaud. Néanmoins, Ryhove n'osa pas encore rentrer à Gand, qui, d'ailleurs, était assiégé par l'armée du prince de Parme : il y envoya d'abord un de ses capitaines, nommé Sinddematle, pour sonder le terrain ; mais les Gantois font prisonnier son émissaire. Alors Ryhove se rend à Anvers, mandé par le conseil [A RELIRE] par les membres des Etats de Brabant et par le magistrat. Marnix de Sainte-Aldegonde le presse de rentrer à Gand. fût-ce sous un déguisement; mais après un échange de propos assez aigres, qu'il rapporte lui-même, Ryhove refusa net de s'y aventurer, à moins qu'on ne lui fournit une armée bien organisée. « Il eût bien esté embarqué en Gand », dit l'Apologie , « s'il eût creu à leur beau advis. II s'eût perdu comme une mouche à la chandelle, et il eût eu beau attandre d'estre assisté par une armée. » Le 18 mai 1584, le magistrat gantois chargea deux commissaires d'aller à Termonde s'aboucher avec Ryhove et les députés des Etats de Brabant. On a conservé leurs instructions qui dénotent une mauvaise volonté manifeste : si des secours prompts et décisifs ne sont pas envoyés à Gand, on ouvrira les portes au prince de Parme. En vain le Taciturne écrit-il lui-même de Delft aux échevins de Gand, le 19 juin 1584, peu de jours avant son assassinat, pour les conjurer de résister encore quelque temps, leur déclarant qu'il rassemble une armée, et que Ryhove est chargé de leur donner de sa part les assurances les plus formelles. Celui-ci avait perdu tout crédit à Gand ainsi que le prince d'Orange lui-même. Ryhove resta donc provisoirement à Termonde, où il eut encore beaucoup de peine à maintenir dans l'obéissance les soldats qu'il avait sous ses ordres. Puis, ayant remis le commandement de la ville à Philippe vander Gracht, seigneur de Mortaigne, qui avait épousé sa nièce Marie de la Kethulle, Ryhove partit, le 12 juillet 1584, pour Anvers, dans le but de conférer avec les autorités qui y étaient réunies, et de prendre des mesures pour secourir Gand, Là, on le renvoya aux Etats généraux réunis dans le Nord. Suivant ce conseil, Ryhove se rendit en Hollande, exposa la situation désespérée de Termonde et de Gand, fut admis à participer aux délibérations du Conseil, mais, n'obtint que de bonnes paroles. Le prince d'Orange, qu'il avait toujours servi avec tant de dévouement, venait d'être assassiné à Delft (10 juillet 1584), quand Ryhove y arriva. Les organisateurs des obsèques semblent avoir voulu rendre hommage à sa fidélité inébranlable envers le défunt ; en effet, dans son Apologie, Ryhove dit avec une fierté bien légitime : « Le jour vient qui estoit ordonné pour enterrer et sépoulturer le corps.de feu le prince d'Orange, et on l'enterra à Delft (3 août). Ryhove fut prié ou semonce pour assistera l'enter-« rement et pour accompagner le deuil, et portoit le grand estandart, marchant en pompes funèbres. » Bor confirme ce détail : De heere van Rijhoven (droeg) sijn guidon of veldwimpel, c'est-à-dire, que Ryhove portait l'étendard de bataille du Taciturne. Le surlendemain, Ryhove tomba gravement malade ; plusieurs fois il fut en danger de mort ; « et continua icelle maladie l'espace de demy an, n'estant assisté de personne, tellement qu'il peult dire par expérience : Tempora si fuerint nubila, solus eris. » Quand il fut enfin convalescent, il apprit que Gand et Termonde étaient tombés aux mains du prince de Parme et que ses biens avaient été confisqués et publique- . ment affichés à Gand aux portes du château des Comtes, de l'hôtel de ville et, des principales églises, en même temps que ceux des autres fugitifs (16 mai 1585). De leur côté, les Etats généraux le traitèrent avec indifférence, « sans qu'on luy présentast une maile ny denier pour les services et la perte des biens qu'il avait faicte pour le prince et les Estats. » Dégoûté, il passa en Angleterre, ou la reine Elisabeth faisait mine de vouloir se charger de la défense des Provinces-Unies, laissées sans chef depuis la mort du Taciturne. Il espérait lui-même « avoir entretenement et estre employé ». Le comte de Leicester le présenta à la reine, mais nous ne savons ce qui s'ensuivit; car c'est ici que Ryhove arrête sa confuse et pittoresque Apologie, écrite par lui en Angleterre, en 1585, et conservée actuellement au British Muséum » comme tyré hors la « copie escripte de sa propre main ». Ce n'est pas sans amertume qu'il s'y représente, en terminant, comme « ayant faict perte de tous ses biens, sans avoir le moyen de s'entretenir avecq sa femme et enfants qui ont suivy son party, et par plusieurs blasmé à tort.; mais il loue Dieu qui l'a préservé, et il vit encore, quel povre et affligé qu'il est, en despit de ses ennemis, grâces à Dieu ». Hellin dit qu'il mourut à Utrecht en 1586. M. Van Hoorebeke place son décès à Harlem, le 14 juin 1592. Pour Utrecht, on ne possède de registres mortuaires que depuis 1623 et pour Harlem, qu'à partir du 4 octobre 1598. Mais il résulte d'un acte de 1610, conservé aux archives de Gand, que Ryhove est mort le 15 juin 1585, après avoir épousé à Delft, le 3 novembre 1584, sa troisième femme Cornélie Poussens ; de cette union naquit un fils (François), mort avant 1610. Riche et insouciant de la politique au commencement des troubles de Gand, Ryhove fut entraîné malgré lui dans le tourbillon des affaires. Il s'y jeta d'ailleurs avec la violence irréfléchie qui le caractérisait. Il ne semble avoir possédé aucune des qualités de l'homme d'Etat et avoir été un général assez médiocre. Audacieux, peu scrupuleux, avide, impétueux jusqu'à la brutalité et la cruauté, i1 joua un rôle prépondérant dans l'arrestation des seigneurs catholiques et dansl'abominable exécution du conseiller Hessels et du bailli de Visch. Mais il faut dire à son honneur qu'il se rallia bientôt, et pour la vie, à la politique tolérante et nationale du prince d'Orange. C'est ainsi que Ryhove contribua puissamment à faire admettre à Gand la Paix de religion, ce chef-d'œuvre du Taciturne, et que le parti ultra-calviniste d'Hembyze n'eut pas d'adversaire plus redoutable que lui. Dans cette lutte de tous les instants qu'il soutint pendant six longues années à Gand, à Termonde et dans toute la Flandre contre l'intransigeance sectaire des protestants exaltés, Ryhove déploya une énergie et une ténacité indomptables. Il mit le même dévouement et la même constance à défendre la cause de l'indépendance nationale et de la liberté religieuse contre les Malcontents et l'Espagne, ne se laissant abattre ni par les revers ni par la perspective de sa ruine personnelle. Après avoir été l'un des premiers à protéger les catholiques flamands, qui d'oppresseurs cruels étaient à leur tour devenus des opprimés, il fut l'un des derniers en Flandre à ne pas désespérer de la liberté et de la patrie, alors que tous les courages faiblissaient et que toutes les consciences s'offraient en vente à Alexandre Farnèse. Ryhove fut avant tout un homme d'action, dominé par les passions violentes qu'on retrouve dans le cœur de presque tous ses contemporains ; mais l'histoire lui rendra cette justice qu'il finit par s'attacher à la cause la plus noble, qu'il la servit en exposant plusieurs fois "sa vie et en y perdant toute sa fortune, et qu'il lui resta fidèle sans défaillance jusqu'à la mort.
(1) Sa seconde femme s'appelait Isabeau de Preudhomme. I1 avait épousé en premières noces Suzanne van den Haute; de ce mariage étaient issus deux fils (Philippe et Louis) et deux filles (Jeanne et Catherine-Jacqueline). Pour son fils Louis, voir l'article suivant.
' Paul Fredericq. — Herman Vander Linden.
Archives communales de Gand : Keure-resolu-tien,1576 ad 1584 ; Verbaelen enderesolutien van d'Edele ende Leden van de Poorlerye van Gend, 1577 ad 1583; Jaerregister van der Keure, 1541-1542. A° 1541, fol. 213,-vérso; Ibid., 1609-1610, fol. Il6; Liasse: Stuks Ryhove. — Apologie de, François de la Kethulle, seigneur de Ryhove, par luy-mesme composée, 1586 (publ. par Rervyn de Lettenhove dans ses Documents inédits relatifs à l'hist. du xvic siècle, t.1"). — Fr. de Halewyn, Mémoires sur les troubles de Gand (1577 1579), publiés par Kervyn de Volkaersbeke.—Philippe van Campene, Diarium rerum Gandavensiurr. 1566 - 1585, manuscrit de laBibliothèque royale de Bruxelles ; et sa trad. flam. éunurlôe : l'h.duKeinpcnare (sic), Vlaemsdie kronyk, publiée par l'h. Blommaert (1839).—Politieke ballade, refereinen liederen en spoigedicluen der xv.e eeuw, publié par Ph. Blonirnaert (I847).—Kervyn de Volkatisbekt, Cf Dico Bio Belge pour suite références
(source Dico Bio Belge)

KETHULLE (Louis de la ou van der), second fils du précédent, naquit probablement à Gand,vers l565; en effet, on le dit âgé d'environ seize ans, dans les lettres patentes du 31 mai 1581, par lesquelles les échevins de Gand, voulant reconnaître les grands services rendus à la patrie par le seigneur de Ryhove son père, accordaient à celui-ci et à chacun de ses enfants d'importantes pensions viagères. Pour sa part, le jeune Louis devait recevoir mille florins par an.
Après les victoires décisives d'Alexandre Farnèse en Flandre et en Brabant, il suivit son père dans les provinces septentrionales et y servit avec éclat dans l'armée des Etats généraux, sous les ordres de Maurice de Nassau. En 1591, il se signala tout particulièrement au siège de Deventer. Un Albanais de la garnison espagnole, « comme un autre Goliath », provoquait insolem-men.t en duel toute l'armée assiégeante; mais Maurice fit défense à ses soldats d'accepter le défi. Cependant le jeune Louis de la Kethulle obtint la permission de se battre avec l'Albanais qu'il défit en présence des deux armées. Celui ci, en se déclarant vaincu, jeta sa chaîne d'or autour du cou clé son vainqueur. Maurice de Nassau fit soi-. gner la blessure de l'officier espagnol et le renvoya au gouverneur de la place avec une lettre flatteuse. Quant à Louis de la Kethulle, qui avait alors vingt-cinq ou vingt-six ans, ce duel le mit du coup en évidence. Le 7 décembre 1618, Maurice le nomma à un poste de confiance : il l'envoya à Bergen-op-Zoom comme gouverneur militaire, au moment où la trêve de douze ans avec l'Espagne était sur le point d'expirer, et où les places de la frontière allaient être exposées aux premiers coups de l'ennemi. Dans sa commission, qui porte la signature du prince d'Orange et est conservée aux archives de Bergen-op-Zoom, Louis de la Kethulle est qualifié de seigneur de Ryhove (heere van Ryhoven), titre qu'il ne pouvait porter que si son frère aîné Philippe était mort. Celui-ci avait aussi pris service dans les armées des Etats généraux, mais il y joua un rôle plus effacé. Bientôt se présenta pour Louis l'occasion de se signaler de nouveau; car Bergen-op-Zoom dut soutenir, du 18 juillet au 3 octobre 1622, un siège mémorable contre l'armée espagnole commandée par le fameux marquis de Spinola en personne. La ville, défendue par le seigneur de Ryhove, repoussa tous les assauts; et, au bout de près de quatre mois d'efforts infructueux, Spinola dut lever le siège et se retirer. Lorsque Bergen-op-Zoom fut délivré, le magistrat vota, le 16 octobre 1622, une série de recompenses pour ceux qui s'étaient distingués pendant le siège. Louis de la Kethulle reçut pour sa part un don de 40 florins carolus. Il resta gouverneur militaire de la ville jusqu'à sa mort, qui doit être survenue vers le 21 octobre 1631. En effet, ce jour-là, le magistrat résolut de porter le décès de Ryhove à la connaissance du prince d'Orange et de l'inviter à pourvoir à son remplacement. On voit encore aujourd'hui, dans la grande église de Bergen-op-Zoom, la pierre tombale que sa seconde femme (1) Emerence de Ravenswaey lui érigea. Elle porte l'épitaphe qui suit :
TIBI,
LVDOVICE DE KETVLLE, DYNASTE DE
RlHOVE, QV1 PRIMARYS IN EQVESTRI
MILITIA DIGNITAT1BVS DEFVNCTVS,
VITAM CVM VRtBIS HVIVS REGIMINE AMISISTI,
CV1VS
V1RTVEM ADMIRANTVR S1NGVLI,, PRVDENTIAM OMNES,
MORTEM NEMO, VXOR MOESTA H. M. P.
Obyt Anno CIO IOC X.X.XI.
Sa femme le suivit dans la tombe en 1634, et fut enterrée auprès de lui. Son épitaphe latine est gravée sur la même pierre, à côté de celle de son mari.
Paul Fredericq.
Archives communales de Bergen-op-Zoom — Archives de l'Etat à Bois-le-Duc.—Genealogische verznmeling der Waalsche Bibliotheek te Leiden.
— J Revius, Vaventria illustrata (Leide, 1651 .
— J. Revius, Jaerdicht op de verlossinge der stadt Deventer wt het yewelt der Spanjaerden, dans son recueil Orerysselsclte snngen en dichten fu2e édition, Leide. 1(v54). — (Lambert de Rijcke. Nathan Vay et Job du Rieu, pasteurs), Bergen op dtn Zoom belegherl op den 18 Julij 1622 ende ontleghert den 3 Octobns des seiuen jaers (,Mid-ddbourg,1623). — Et tous les historiens du temps.
(source Dico Bio Belge)

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